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Carte des risques sismiques de la Suisse (Source: EPF Zurich,
Service sismologique suisse) |
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En guise d’ouverture, Donat Fäh du Service
sismologique suisse, s’est fait quelque peu rassurant :
«En Suisse, chaque génération n’est pas
touchée par un fort tremblement de terre». Pourtant de
forts séismes, tels que ceux qui se sont produits à
Bâle en 1356 ou encore à Viège en 1855, avec
des magnitudes de six et presque sept sur l’échelle de
Richter, et qui ont provoqués des dégâts
considérables, peuvent se produire en tout temps. Cela parce
que la rencontre des plaques tectoniques provoque sous la Suisse
aussi des tensions dont la libération engendre des
séismes. Les régions à risque sont avant tout
celles de Bâle et du Haut-Valais. Le Service sismologique
enregistre chaque jour plusieurs petits tremblements de terre qui
ne sont pas perceptibles ni dangereux pour l’homme. Et
pourtant, comme l’explique Fäh, on peut s’attendre
à ce qu’un fort tremblement de terre se produise au
Valais dans les 20 à 30 prochaines années.
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Le
public de près de deux cent personnes
s’intéressait donc bien évidemment avant tout
aux mesures possibles pour protéger les nouveaux immeubles
mais aussi en bâtiments existants. «Lors d’un
tremblement de terre tel que celui de Viège,
l’amplitude des mouvements horizontaux du sol atteint 10
centimètres», explique Hugo Bachmann, professeur
émérite de l’EPFZ et président de la
Fondation pour la dynamique des structures et le génie
parasismique. «Les fondations sont contraintes de suivre ces
mouvements». Et si la partie supérieure du
bâtiment ne possède pas une résistance sismique
suffisante, elle s’effondre. Deux possibilités
s’offrent pour l’éviter, soit renforcer le
bâtiment, soit «l’assouplir»; des
méthodes totalement différentes mais qui fonctionnent
toutes deux. |
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La solution: renforcer ou assouplir
Avec le renforcement, le bâtiment est contraint de suivre les
mouvements sismiques. Pour cela, il faut le rigidifier, de
préférence avec des parois de béton
armé, d’une largeur de deux à trois
mètres, disposées perpendiculairement entre elles et
continues depuis les fondations jusqu’au dernier étage.
Ceci confère à la construction une stabilité
suffisante pour empêcher son effondrement en cas de
séisme. En effet, le risque d’effondrement est majeur
principalement lorsque des murs verticaux continus manquent dans
une partie de l’immeuble. En cas de séisme, ces
«étages mous», qui supportent plusieurs
étages au-dessus d’eux par des piliers ou des colonnes,
ne sont pas en mesure de soutenir l’ensemble du
bâtiment.
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Vue du hall de l’hôtel Azadi à
Téhéran: Afin d’assurer la
sécurité antisismique de cet hôtel de 28
étages, ses piliers en béton armé de dix
mètre de hauteur ont été enveloppés de
bandages de CFC.
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Au lieu
de transformer totalement le bâtiment, on peut aussi, comme
l’explique Bachmann, «assouplir» ses fondations.
Pour cela, les murs extérieurs du sous-sol sont
coupés horizontalement au dessous du sol pour placer ensuite
à distance régulière dans l’espace ainsi
ménagé des disques de caoutchouc d’un
diamètre d’environ cinquante centimètres. En cas
de tremblement de terre, ces appuis élastiques amortissent
les mouvements horizontaux du sol et la partie supérieure du
bâtiment reste alors stable. |
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Un développement de l’Empa
Les composites renforcés de fibres de carbone (CFC)
offrent une autre possibilité fort prometteuse pour le
renforcement parasismique des bâtiments existants. Ce
procédé, développé par l’Empa, est
utilisé dans le monde entier pour prévenir
l’effondrement des bâtiments, comme l’explique Masoud
Motavalli du laboratoire Ingénierie
des structures de l’Empa. Les CFC sont, par exemple,
fixés sous forme de bandages autour des piliers porteurs
pour les stabiliser. En cas de tremblement de terre, les charges
des étages sus-jacents viennent s’applique sur les
piliers. Souvent ces piliers ne sont pas en mesure de supporter ces
charges, ils se fissurent et se fragilisent pour finir par se
rompre. Les bandages de fibres de carbone appliqués sur les
piliers sont en mesure de prévenir cette ruine. Sous charge,
ils créent dans les piliers une contrainte interne qui leur
confère automatiquement une stabilité plus
élevée et empêche leur effondrement. Cette
méthode permet aussi de stabiliser les parois.
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Montage de câbles en CFC installés sur la
façade du bâtiment administratif de l’Empa en
2008 pour son renforcement antisismique.
L’équipe de Motavalli travaille encore sur
d’autres solutions pour assurer la sécurité
parasismique des bâtiments. Ces chercheurs placent en
particulier de grands espoirs dans les alliages dits à
mémoire de forme – autrement dit ces alliages que
l’on peut déformer à volonté et qui
retrouvent leur forme initiale lorsqu’ils sont
chauffés. Ces matériaux pourraient s’utiliser
par exemple pour le renforcement de piliers porteurs. En
particulier lors des incendies – qui souvent aussi suivent les
tremblements de terre – ils pourraient aider les structures
à conserver leur capacité portante sous ces
sollicitations thermiques élevées.
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Alors que ce serait si simple ….
Ce 43e Apéro scientifique l’a donc
démontré : il existe différentes
possibilités, en majeure partie fort simples, de se
prémunir contre les risques d’un tremblement de terre
qui, selon Fäh, se produira certainement un jour ou
l’autre. Des modifications simples et peu compliquées
à réaliser permettent d’empêcher des
effondrements. Malgré cela, actuellement toutes les
constructions nouvelles ne sont pas automatiquement sûres sur
le plan sismique. «Les normes de construction n’ont pas
suffisamment de force obligatoire, elles ne sont pas toujours
respectées» commente Hugo Bachmann. Ce n’est
qu’à Bâle et en Valais qu’elles sont
appliquées avec conséquence. Cela alors que la
sécurité sismique sur un bâtiment neuf
n’exerce guère d’influence sur son coût.
Comme le déclare Bachmann: «Les coûts
supplémentaires sont faibles, ils se situent entre
zéro et un pour-cent du coût total de la
construction.
Cornelia Zogg
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